N Les Kuerner, recherches biographiques
2 participants
l'art comme on l'aime :: Arts 2D : peinture, photo, arts graphiques, vitrail... :: Peinture et arts graphiques :: Andrew Wyeth
Page 1 sur 1
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Très beau travail d'enquête, Northman! Chapeau!
Que tu aies retrouvé les noms des bateaux de ces "migrants" m'a impressionné!
Ce qui me frappe, en regardant ce tableau, c'est qu'il est dur, et que Wyeth ne faisait pas de cadeaux à ses amis. De même que dans le portrait de Christina Olson.
Karl Kuerner, montré en contreplongée, a un air "satisfait de lui-même" assez désagréable, un air dominateur même.
La lézarde au plafond, qui rejoint sa tête - ou part de son crâne peut-être? - est franchement inquiétante: ne serait-il pas un peu fêlé, cet homme?
Sans parler des deux crochets...
Je trouve que ce portrait fait peur, et il est très surprenant que Wyeth ait représenté de cette façon un homme qu'il considérait comme un ami.
Il en va un peu de même avec le double portrait d'Anna et de Karl. Il est dur et cru. Comment Wyeth pouvait-il montrer ces tableaux à ses modèles sans que ceux-ci les vivent mal?
Et je pense avoir compris que Wyeth lui-même n'appréciait pas la chasse ni les armes à feu... Sur quelles bases pouvaient s'établir leurs relations?
Que tu aies retrouvé les noms des bateaux de ces "migrants" m'a impressionné!
Ce qui me frappe, en regardant ce tableau, c'est qu'il est dur, et que Wyeth ne faisait pas de cadeaux à ses amis. De même que dans le portrait de Christina Olson.
Karl Kuerner, montré en contreplongée, a un air "satisfait de lui-même" assez désagréable, un air dominateur même.
La lézarde au plafond, qui rejoint sa tête - ou part de son crâne peut-être? - est franchement inquiétante: ne serait-il pas un peu fêlé, cet homme?
Sans parler des deux crochets...
Je trouve que ce portrait fait peur, et il est très surprenant que Wyeth ait représenté de cette façon un homme qu'il considérait comme un ami.
Il en va un peu de même avec le double portrait d'Anna et de Karl. Il est dur et cru. Comment Wyeth pouvait-il montrer ces tableaux à ses modèles sans que ceux-ci les vivent mal?
Et je pense avoir compris que Wyeth lui-même n'appréciait pas la chasse ni les armes à feu... Sur quelles bases pouvaient s'établir leurs relations?
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Jean-Yves Amir a écrit:Très beau travail d'enquête, Northman! Chapeau!
Que tu aies retrouvé les noms des bateaux de ces "migrants" m'a impressionné!
Merci. Un moment d'émotion avec ces paquebots transatlantiques, toute une époque, mais cela a surtout permis de trouver l'année de naissance d'Anna Kuerner.
Jean-Yves Amir a écrit:La lézarde au plafond, qui rejoint sa tête - ou part de son crâne peut-être? - est franchement inquiétante: ne serait-il pas un peu fêlé, cet homme?
Sans parler des deux crochets...
Oui, fêlure, exactement ça... Ou encore, pas une araignée, mais des orages dans le plafond, qui occupe tout le haut du tableau et est écrasant, dominant la tête de Karl Kuerner, qui lui même dominait son petit monde d'une poigne de fer... atmosphère lourde. Crises de violence foudroyantes qui arrivent sans crier gare, en particulier sous l'emprise de l'alcool. L'éclair est comme canalisé par un des crochets de boucherie, Karl a vécu celle de 14-18 et ça a laissé des traces, que nous retrouverons dans Spring. Et à son arrivée aux USA son oncle de Philadelphie n'a rien trouvé de mieux que de lui trouver un emploi dans un abattoir. Pas très psychologue, l'oncle d'Amérique. Cela me rappelle aussi un petit ( dans les deux sens du mot) président qui disait vouloir pendre un de ses rivaux à un crochet de boucherie. Grande violence verbale trahissant un état d'esprit totalement indigne d'un président...
Jean-Yves Amir a écrit:Je trouve que ce portrait fait peur, et il est très surprenant que Wyeth ait représenté de cette façon un homme qu'il considérait comme un ami.
Il en va un peu de même avec le double portrait d'Anna et de Karl. Il est dur et cru. Comment Wyeth pouvait-il montrer ces tableaux à ses modèles sans que ceux-ci les vivent mal?
Et je pense avoir compris que Wyeth lui-même n'appréciait pas la chasse ni les armes à feu... Sur quelles bases pouvaient s'établir leurs relations?
C'est exactement la bonne question. Pour y répondre, nous devrons faire le même style de travail biographique qu'ici, mais sur les racines d'Andrew Wyeth, son enfance et la personnalité de son père. C'est un travail qui permettra aussi d'aller plus loin sur des tableaux que nous avons déjà commencé à analyser. Qui s'y colle ?
Dernière édition par Northman le Dim 12 Mar 2017 - 12:35, édité 1 fois
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Northman a écrit: Qui s'y colle ?
Je dois te dire, Northman, que j'ai toujours été réticent vis à vis de l'approche biographique des artistes... Suite de l'échange déplacé ici.
Dernière édition par Jean-Yves Amir le Dim 12 Mar 2017 - 23:09, édité 1 fois
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Je tombe à l'instant sur ceci, qui croise bien (si je comprends) ce qui a été dit plus haut.
Source http://biographiesii.blogspot.fr/2016_03_01_archive.htmlHe liked the idea that figures might be implicit in the image. He suggested that “Christina’s World” might have been better had he “painted just that field and have you sense Christina without her being there.” Occasionally, as when he painted Christina head-on, he turned her face into a kind of landscape, the weathered features being a topography.
His subjects were family, friends and his immediate surroundings in Pennsylvania and in Maine, the reflections of the circumscribed existence he chose for himself. Repeatedly he painted, besides Christina, his friend Walt Anderson; Ben Loper, a black handyman, who posed for “A Crow Flew By,” and Karl and Anna Kuerner, neighbors whose farm became the Pennsylvania counterpoint to the Olson’s place in Maine. Karl was an avid hunter and a former German machine-gunner in World War I who died in 1979, at 80. There were rumors that he was a Nazi sympathizer, which drove Wyeth during World War II to search the Kuerner house for a wireless spy transmitter.
Wyeth said he was intrigued by the combination of cozy domesticity at the Kuerners’ and the knowledge that Karl had gunned down soldiers. One portrait of Karl shows him cradling a rifle. It was done in a room at the house with a moose rack on the wall. Wyeth recalled that while he was painting Anna walking into the room to summon her husband to dinner, the barrel pointing directly at her. He quickly rubbed out the antlers and painted her in. Wyeth’s wife later titled it “America’s Sweethearts.”
Wyeth described several other portraits of Karl as surrogate portraits of N.C., whom he had never painted. His father died in 1945 with a grandson, Newell, the four-year-old son of N.C.’s son Nathaniel and daughter-in-law Caroline, when their car stalled on a railroad crossing. It was struck by a train, an event that Wyeth linked to such melancholic and metaphoric pictures as “Winter,” of 1945. “The German,” a portrait of Kuerner in a helmet, was painted in 1975 when he was dying of cancer. Wyeth said he was painting cold eyes “that have looked down a machine-gun barrel, squinted great distances,” adding, “those are my father’s lips — cruel.”
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Jean-Yves, as-tu pensé à nos amis non-anglophones ? Ton texte ci-dessus est important mais il faudrait le traduire pour mieux l'utiliser ensuite.
Le plafond semble écrasant, étouffant sur ce portrait de Karl : Il surplombe de très près la tête de Kuerner, effet augmenté par la vue en contre-plongée qui elle-même renforce le côté dominateur de Kuerner - voir plus haut ce qu'a écrit Jean-Yves-, qui effectivement menait, à la ferme, très fermement son petit monde :
Le "plafond"*, celui du ciel, la base des nuages, est bas et lourd, pesant. Après l'éclair, le tonnerre gronde...
Kuerner domine mais il est lui même dominé. J'ai eu l'intuition qu'il devait exister une expression idiomatique anglaise qui entrerait en pleine résonance avec ce tableau, et je l'ai effectivement trouvée :
Source : Harrap's, Dictionnaire des expressions anglaises, ISBN 978 8 81 8702178 ( 423 pages, 10 €, acheté hier) > Ceiling (plafond)> Une seule expression idiomatique proposée, et en plein dans le mille >
"To hit the ceiling. Langage familier : Sortir de ses gonds, piquer une crise, péter les plombs. Ex : When he saw the telephone bill, he hit the ceiling. Quand il a vu la note de téléphone, il a piqué une crise."
"Anna et les cinq enfants des Kuerner participèrent aussi aux durs travaux de la ferme de Chadds Ford. Karl Kuerner menait ce petit monde d'une main de fer, parfois avec violence, les battant parfois simplement pour se défouler de ses frustrations de fermier. Sa fille Lydia se souvient : " Si les vaches faisaient quelque chose de mal, c'est nous qui trinquions. Les coups reçus m'obligeaient à aller à l'école avec le pouce bandé et je devais mentir au professeur en disant que c'était moi qui m'étais blessée, alors que c'était mon père qui m'avait fait cela. Bon... je lui ai pardonné, mais je n'ai jamais oublié". Les punitions qu'il distribuait étaient pires quand il avait bu. En état d'ébriété il fouettait leurs jambes avec une sangle, mais ses punitions préférées étaient pour Karl junior en le forçant à traire les vaches après avoir ôté les protections contre leurs coups de pattes."
Revoir la suite plus haut, ici
Jean-Yves a écrit:Je trouve que ce portrait fait peur,...
Absolument ! Car il est comme un arrêt du temps juste à la fraction de seconde qui peut précéder un "pétage de plombs", un hiting the ceiling...
La contextualisation de ce tableau dans langue de l'artiste peut donc vraiment en approfondir notre compréhension.
* Je vais chercher si les aviateurs anglais utilisent le même mot, les mêmes expressions, comme "le plafond est très bas aujourd'hui"... oui :
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Spring (1978)
C'est demain l'équinoxe de printemps, occasion de revenir sur le tableau Spring (1978) d'Andrew Wyeth, à la lueur des
découvertes biographiques sur Karl Kuerner, ci-dessus :
L'étymologie du mot spring évoque le surgissement, que l'on retrouve dans un second sens de ce mot, ressort. Je suis
quasiment certain que Wyeth a donné ce titre en laissant la possibilité de l'interpréter dans les deux sens. Nous allons
voir pourquoi...
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Jean-Yves Amir a écrit:J'ajoute tout de suite ce commentaire de Wyeth sur Spring car je crois qu'il répond très bien à ce que tu ressens.... Cette histoire tapie sous le sol, sous "l'ossature du paysage"....
WYETH 1978 SPRING
Voici une étrange image de Karl Kuerner (voisin et ami de Wyeth à Chadd's Ford) qui m'a emmené loin et profond. Elle a une bonne qualité qui vous "tire". (?) C'est venu quand je l'ai vu dans son lit, agé et de plus en plus malade. Il s'est brusquement réveillé et a dit : "Andy, tu as entendu ce claquement?". Il avait le regard lointain... Ce bruit sec était son souvenir des barbelés qu'on coupait sur le front pendant la première guerre mondiale. Une nuit, il avait entendu ce son et avait ouvert le feu avec sa mitrailleuse. Son supérieur l'avait incendié. Quand le jour se leva, il y avait un bataillon entier de soldats français morts, sur les fils juste devant son poste de tir. Il a eu la Croix de Fer. Mon Dieu, j'avais l'impression d'être avec lui sur le front de l'ouest, assis à ses côtés. Cette histoire m'a emmené loin de là où j'étais - avec un vieil homme alité - et j'ai pensé "cet homme est hors du temps", et j'ai alors commencé à penser à ces monticules (amoncellements? tumuli?) là haut sur la colline et pourquoi ne pas le mettre dans l'un d'entre eux.
Il y a cet autre "monticule" là-bas et j'espère que les gens qui regardent ce tableau demanderont "Qui est là-dedans?" (Merci à Slvbdx pour sa traduction)
Source: "Andrew Wyeth, Autobiography" Introduction by Thomas Hoving, ed Bulfinch Press, Hachette Book Group
Lien interne : https://lartcommeonlaime.forumactif.org/t275-winter-quelque-chose-attend-tapi-dessous#3455
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
Re: N Les Kuerner, recherches biographiques
Karl Kuerner est décédé le samedi 6 janvier 1979 d'une leucémie. Le tableau a été peint en 1978. Il serait intéressant de savoir à quel mois. Karl Kuerner approche de la fin de sa vie et lui remonte, resurgit, du passé une scène de guerre sur laquelle il faut réfléchir un peu. En effet Karl Kuerner était mitrailleur, nous avons vu cela plus haut, et de jour, vu la portée de l'arme, les hommes qu'il abattait étaient loin, sur le no man's land. Avec cette histoire de tentative d'un bataillon français de passage de la ligne de fils barbelés protégeant la tranchée allemande, Karl Kuerner tire de nuit, au jugé, et voit au lever du jour le terrible "spectacle" des hommes qu'il a tués, cette fois de près. Difficile de dire combien d'hommes tués, il faudrait être certain de la précision du mot "bataillon", mais ce qui est sûr c'est qu'il aura pu alors réaliser de près ce qui se passait la plupart du temps de loin, voir de près les effets de sa redoutable faucheuse d'hommes. Cette scène de guerre traumatisante pourrait donc être, peu avant sa mort, comme un resurgissement, une remontée à sa conscience, un "effet ressort" du passé, et nous pourrions avoir là un second sens du titre Spring.
Mais je propose de reprendre d'abord l'oeuvre à l'état brut, en dehors de toute contextualisation :
https://lartcommeonlaime.forumactif.org/t290-etude-de-spring-1978
Nous y reviendrons ensuite.
Northman- Messages : 547
Date d'inscription : 17/05/2015
Age : 61
Localisation : Normandie
l'art comme on l'aime :: Arts 2D : peinture, photo, arts graphiques, vitrail... :: Peinture et arts graphiques :: Andrew Wyeth
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|